By Pascale Voyer-Perron
Vous avez probablement déjà tenté de faire l’une de ces choses, avec succès ou non. Malgré de bonnes intentions, établir une nouvelle habitude peut être très difficile. Nous vous proposons aujourd’hui d’explorer quelques théories en psychologie et en science du comportement qui vous aideront peut-être à mieux comprendre les mécanismes que ça sollicite et de vous rapprocher de votre objectif.
Avant d’en apprendre davantage sur les mécanismes des habitudes, on se doit de déconstruire le fameux mythe selon lequel il faut 21 jours pour établir une nouvelle habitude. Il s’agit d’une croyance populaire bien ancrée, mais qui n’a pas de fondement scientifique. En fait, celle-ci a pris racine en 1960, dans un livre publié par un chirurgien américain nommé Maxwell Maltz. Celui-ci a observé que ses patient.e.s prennent environ trois semaines suite à leur chirurgie esthétique pour s’habituer aux changements faits sur leur corps. C’est sur cette impression que Maltz fonde sa théorie qui inspirera la fameuse expression. Sa théorie a été reprise par d’autres auteur.e.s ensuite, ce qui a contribué à sa popularisation. Des études ont tenté de vérifier la durée réelle pour établir une nouvelle habitude et 21 jours seraient insuffisants pour la plupart des gens pour atteindre ce but [1].
Pour mieux comprendre les mécanismes de l’habitude, faisons-en son autopsie! L’auteur James Clear reprend les quatre étapes à l’habitude initialement proposées par l’auteur Charles Duhigg. Celles-ci se succèdent et se répètent comme un cycle et leur compréhension pourrait aider à établir une nouvelle habitude [2]. Voici une brève description de ces étapes avec un exemple bien concret :
Disons que je souhaite désormais faire une marche de 30 minutes à tous les jours. D’abord, un signal indique au cerveau de produire un certain comportement. Ce signale est lié à l’attente d’une potentielle récompense. Dans cet exemple, je peux voir le soleil briller dehors et ressentir la chaleur de ses rayons. Ces sensations déclenche un signal dans mon cerveau me disant « Je dois aller marcher ». La récompense qui peut être liée à cette action est le sentiment de bien-être qui suit la marche.
2. Le « craving »
Le « craving » s’agit de la motivation qui nous pousse à l’action, déclenché par le signal précédemment décrit. Celui-ci est absolument nécessaire, autrement, on demeure passif.ve. Pour prendre l’habitude de marcher 30 minutes quotidiennement, je peux avoir l’envie de le faire en voyant justement la belle météo à l’extérieur. L’élément qui déclenche le « craving » est grandement variable d’une personne à l’autre. L’exemple de l’auteur Clear illustre bien cette différence : pour certaines personnes, le son et la musique d’une machine à sous dans un casino peut déclencher un « craving » alors que pour d’autres, il ne s’agit que d’un bruit de fond comme un autre [2].
3. La réponse
La réponse est la prochaine étape à l’habitude. Naturellement, après avoir eu un signal et la motivation de se mettre en action, on produit l’habitude! Il y a par contre une condition à faire cette habitude : on doit être prêt.e à mettre l’effort demandé par cette habitude. Ce n’est bien sûr pas toujours le cas, par exemple quand on a peu d’énergie ou que l’habitude demande un grand effort. Alors, après une journée chargée me laissant épuisée, il est possible que je ne prenne pas ma marche de 30 minutes cette fois.
4. La récompense
En dernier vient la récompense, qui a deux fonctions : la satisfaction et l’apprentissage. Rappelons-nous qu’il s’agit de la récompense au tout début du processus qui enclenche, puis motive la production d’une habitude. C’est enfin à ce stade qu’on l’obtient! Toujours avec l’exemple de la marche, je pourrais ressentir le bien-être qui suit cette activité et retenir que celle-ci me fait sentir bien. Avec le temps, j’apprends les bienfaits de la marche et l’habitude s’instaure.
La modèle transthéorique du changement est une théorie bien connue en psychologie et dans les sciences de la santé. Celui-ci est différent du modèle que je viens de vous présenter. Celui-ci nous renseigne plutôt sur les étapes par lesquelles une personne passe pour réaliser le besoin de changer une habitude ou un comportement, se préparer à changer, faire ce changement et maintenir dans le temps [3].
Il y a d’abord la précontemplation. À ce stade, on ne reconnaît pas la présence d’un problème et on ne voit pas la nécessité de changer. Heureusement, si vous lisez cet article, c’est probablement parce que vous avez déjà franchi cette étape de votre cheminement!
La contemplation est le stade suivant. On prend alors conscience d’un problème, mais on demeure ambivalent.e face au changement. On voit certains avantages à changer, mais autant d’inconvénients à le faire.
Puis, il y a la préparation. Les avantages à changer surpassent les désavantages. On commence à planifier les actions à mettre en place pour changer.
C’est ensuite l’action. C’est à partir de ce moment qu’on met en pratique les actions planifiées pour changer. Les bienfaits de ce changement commencent même à se faire ressentir!
Finalement, il y a le stade du maintien. Il s’agit du moment où le changement souhaité est maintenu régulièrement pendant au moins six mois. Attention toutefois : même une fois au stade du maintien, il est possible de rechuter et perdre les acquis qu’on a fait dans les derniers mois. Ne vous inquiétez pas par contre, la rechute est normale dans le processus de changement et elle peut arriver à tout moment dans votre cheminement. Il est d’ailleurs important de continuellement se préparer à la rechute et de comment nous allons encaisser ce moment souvent très décourageant. Ce n’est pas parce qu’on vit une rechute qu’on revient à la case départ ! Non heureusement ce n’est pas une partie de Monopoly. Étant donné que vous avez fourni les efforts nécessaires dans le passé pour établir une bonne habitude, il vous sera d’autant plus facile et rapide de la réinstaurer car vous connaissez déjà le mode d’emploi.
Et voilà, vous voici outillé.e.s de plusieurs notions sur comment établir une nouvelle habitude. Nous espérons que celles-ci vous aideront à y voir plus clair. Avec tout ce que nous présente les réseaux sociaux, les médias et la publicité, changer une habitude est présenté comme quelque chose de facile et de souhaitable. Toutefois, il faut se rappeler que ce n’est pas nécessairement le cas! Peut-être que ça ne marchera pas du premier coup, qu’il faudra y mettre beaucoup d’effort et que ça ne sera pas plaisant. Nous vous souhaitons du succès dans vos nouvelles habitudes… à votre rythme!
[1]http://www.scientifique-en-chef.gouv.qc.ca/impacts/ddr_21-jours-changer-habitude-faux/
[2] Clear, J. (2018). Atomic Habits: An Easy & Proven Way to Build Good Habits & Break Bad One. États-Unis.
[3] Prochaska, J., & Velicer, W. (1997). The Transtheorical Model of Health Behavior Change. Am J Health Promot. (1),38-48. doi:10.4278/0890-117112.1.38.
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